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L'invité du 13

DU NOUVEAU DANS L’ESPACE DE TRAVAIL ? 13 May 2016

La question que se pose notre invitée Elisabeth Pélegrin- Genel, « Comment (se) sauver (de) l’open space », fait l’objet d’un nouvel ouvrage, qui vient de paraitre.

Elisabeth décortique avec brio le sujet : «  A qui profite l’open space ? »

Dans la continuité de ses livres précédents , notamment «  L’angoisse de la plante verte sur le coin du bureau » « l’art de vivre au bureau » et « Des souris dans le labyrinthe », cette réflexion est la suite logique d’une analyse des deux / trois dernières décennies sur l’évolution de l’espace « destiné au travail » et des mœurs et coutumes qui en découlent.

C’est un domaine qui a énormément et très vite évolué, en revanche la réflexion qui l’accompagne n’est peut-être pas si profonde qu’on le croit. Beaucoup de «  pré supposés »  dans la manière d’organiser un espace par des gens qui ne s’y installeront pas mais qui pensent que ce n’est pas si compliqué. Malheureusement ceux qui décident des plans et de l’organisation spatiale pour leur entreprise sont rarement les premiers concernés, c’est souvent bien pour les autres et peu envisageable pour eux-mêmes pour de multiples raisons…nous explique Elisabeth, forte de ses observations et expériences terrain en tant que conseil.

Réfléchir à l’espace de travail, demande une réflexion sur la personne elle-même, son activité, ses gestes, ses déplacements, son ergonomie, son comportement, ses habitudes…l’environnement  peut-il avoir un effet sur les gens ? Peut-il contribuer à une meilleure performance des usagers ? Quelle importance est donnée à l’utilisateur dans l’organisation spatiale ? De quelles marges de manœuvre dispose-t-il ?

On peut travailler bien dans un environnement moche, et travailler mal dans un bel espace ! Et l’inverse aussi, explique Elisabeth ! Les règles sont parfois difficiles à trouver et tout dépend aussi de la place qu'on occupe dans le collectif de travail! L’organisation spatiale évolue avec les modes et tendances High Tech que les nouvelles générations introduisent au bureau par leur style de vie !

Le prix excessif des M² de l’immobilier… Vaut-il mieux privilégier plus d’espace loin des villes ou moins d’espace en centre-ville ? L’emplacement géographique du bureau va-t-il influencer  le choix du personnel à recruter ? Peut–être !  Alors on pense à d’autres solutions d’aménagement :

Des bureaux cloisonnés des années 50/60, aux immenses plateaux en Open space des années 80/90, ( l’exemple le plus saisissant de la Lloyds à Londres de 1978/1986, avec 12 niveaux de plateaux en open space autour d’un atrium de 60m de haut,  véritable usine technocratique) , on arrive aujourd’hui à un compromis essayant de favoriser l’espace de chacun tout en étant ensemble. Un espace pas forcement privatif avec l’émergence de bureaux non attribués pour les commerciaux et consultants souvent en clientèle, rarement tous présents ensemble! Quelques chaises suffiront au cas où ! Mais on se doit de réserver son bureau sur le plateau de son groupe ! …

ESPACE : C’est vrai qu’il est plus simple pour un manager de voir d’un seul coup d’œil qui est présent et qui ne l’est pas ! Mais on se déplace davantage pour cause de réunions, café, cigarette, téléphone confidentiel et privé ! … alors finalement …

Pour pallier à cette proximité de travail pas si facile à vivre au quotidien, les nouvelles sociétés souvent liées aux nouvelles technologies, réseaux sociaux et autres stars up, ont inventé un nouvel art de vivre au bureau, des espace dédiés à la détente, au repos, au sport, à la convivialité, à l’échange, la communication, mais toujours en open space !

Des aménagements fun et colorés, des espaces sympas et joyeux, qui donnent envie d’y être !  Sont-ils la récompense d’une organisation de travail beaucoup plus autonome et mais très astreignante, avec des horaires libres mais conséquents, avec des salaires moins généreux…en attendant le jackpot ou une manière d’escamoter le travail ? 

COMPORTEMENT : A vouloir rentabiliser l’ensemble des espaces, l’open space  a ses travers et ses avantages, Elisabeth nous donne ses listes dans l’interlude N°1 de son ouvrage. A découvrir ! C’est un régal…

Des nouveaux comportements apparaissent :

La très proche promiscuité du voisin : on s’isole avec un casque en musique ou non, on s’écrit par texto pour aller ensemble fumer une cigarette, ou prendre un café ! On est ensemble mais chacun s’isole, on ne parle plus, le silence est parfois assourdissant dans l’open space !

On partage un bureau selon un agenda déterminé,  qui va favoriser, en contrepartie, le recours au télétravail.

C’est aussi l’ essor des tiers lieux pour gagner en qualité de vie en économisant du temps de trajet une journée ou deux par semaine, sans se retrouver seul à travailler sur sa table de cuisine, et gérer comme on peut une imprimante ou un ordi qui tombe en panne  (oui, c’est du vécu !) tout en faisant partie d’un groupe ! Le plus important !

En cela le bureau devient le lieu de vie professionnel, lieu physique  pour se retrouver,  se voir et partager sans renoncer à sa mobilité.

AMENAGEMENT : Les sociétés et designers qui créent et inventent de nouvelles formes d’aménagements redoublent de créativité pour offrir de nouveaux espaces de réunions, assis ou debout, cloisonnés autours de canapés, self standing ou isoloirs personnels, cabine téléphonique d’un nouveau genre .... Le bureau (re) devient table ! Simple sur 4 pieds… blanc sur un sol moquetté gris ou marron …peu de couleurs, sauf pour les sociétés nouvelle génération, qui préfèrent meubler leurs bureaux en « Emmaüs » et créer une dynamique par ce mélange éclectique des genres.

Alors l’ouverture et la nouveauté se fait du côté des espaces de co-working : l’exemple de la Villa Bonne nouvelle par Orange nous explique Elisabeth, s’étend sur un espace de 350m², des employés d’un département projet d’Orange et des Start up y sont à résidence de 3 à 6 mois selon le projet. Le casting y est scrupuleusement choisi pour rester dans les mêmes sphères professionnelles. « L’objectif principal est de créer les modes de fonctionnement optimaux, dans une culture digitale et de comprendre à quel point ce cadre favorise le développement de la qualité sociale et de la performance économique.

Le lieu permet d’accueillir 50 personnes au maximum pour le temps d’un projet ou pour une opération « flash » telle qu’un séminaire de travail d’une durée de quelques jours. A l’issue de leur projet, les équipes ont vocation à retourner dans le lieu d’origine pour diffuser ces nouveaux modes de travail.» explique Orange !

Quoi qu’il en soit …où qu’il soit, chacun va s’approprier plus ou moins cet espace, de quelques heures à plusieurs années…beau ou moins beau ! Et pourtant nous y passons de longues heures…

Elisabeth conclut dans son livre:

« Il est temps de cesser de se focaliser sur quelques mètres carrés à économiser çà et là, et de promouvoir une vision plus globale. Pour réduire les fastidieux trajets pendulaires, pour favoriser les rencontres au sein de l’entreprise, pour inventer des lieux de travail efficaces, c’est tout le patrimoine tertiaire qui doit être analysé sans à priori et sans le dissocier de son rôle dans la ville »

THM avec la collaboration d’Elisabeth Pélegrin-Genel

Credits photo: Steelcase, Vitra, Bene, THM

Elisabeth Pélegrin-Genel en quelques mots :

elisabeth PG

Architecte DPLG, urbaniste Elisabeth est aussi psychologue du travail.

Elle est également consultante sur les problématiques despace, de travail et d’organisation.

Présidente d’Archinov depuis 2007, elle est l’auteure de nombreux articles dans Office et Culture, Huffington Post entre autres et de nombreux ouvrages sur le bureau, la ville et l’espace.

http://epelegringenel.com/

 « Comment (se) sauver (de) l’open space » Edition Parenthèses est en vente dans toutes les bonnes librairies en ville et sur le net !